Association T60 | Sommet du Pic du Midi de Bigorre | Observation Midi-Pyrénées | France
Un Télescope de 60 cm au Sommet du Pic de Midi
Un joyau entre passion, héritage et science
Parmi les instruments emblématiques du Pic du Midi, le T60 occupe une place toute particulière. Télescope historique, témoin d’une aventure humaine unique, il est aujourd’hui encore un pont entre l’astronomie amateur et la recherche scientifique.
Son histoire, profondément liée à celle de passionnés qui ont cru en son potentiel, incarne à merveille l’esprit d’ouverture et de transmission qui règne au sommet du Pic.
Une optique d’exception, taillée dans la précision suisse

Le cœur du T60 repose sur une pièce d’optique exceptionnelle : un miroir de 60 centimètres de diamètre, taillé au début du XXe siècle par Émile Schär, un opticien suisse de renom. Ce miroir, à l’ouverture très grande (f/2), est considéré comme un petit bijou de l’art optique.
À l’époque, peu d’instruments de cette taille étaient accessibles, et encore moins avec une telle qualité de fabrication.
Monté initialement en configuration Cassegrain, il permettait d’atteindre des focales importantes, idéales pour l’observation planétaire et la haute résolution. L’instrument était capable de distinguer les tâches sombres sur les satellites galiléens de Jupiter, ou encore de détecter les compagnons d’étoiles brillantes comme Sirius.
Il a aussi été utilisé pour explorer les structures complexes des nébuleuses, à une époque où les capteurs numériques n’existaient pas encore.
Le tube en bois du T60 de forme octogonale. Remarquer la configuration Cassegrain.
Quelques pièces mécaniques toujours utilisées de nos jours sont reconnaissables tels le secteur denté, son système de vis sans fin, le cercle d’alpha (on en voit juste une partie derrière le pilier), le cercle de delta, le barillet (document Alix. Collection F.Vaissière).
Le don généreux de Marcel Gentili
L’histoire du T60 est indissociable de celle de Marcel Gentili, un astronome amateur français d’origine juive italienne, passionné d’optique et de science. Pendant la Seconde Guerre mondiale, fuyant les persécutions du régime de Vichy, Gentili trouve refuge au Pic du Midi grâce à la bienveillance de l’équipe de l’observatoire.
C’est dans ces conditions exceptionnelles qu’il noue un lien profond avec le lieu et ses occupants.
En 1946, après la guerre, il fait un don exceptionnel à l’observatoire : il offre le télescope et sa coupole, alors installés dans la région parisienne. Ce geste, chargé de gratitude et de reconnaissance, marque le début d’un nouveau chapitre pour l’instrument. Il est transporté jusqu’au Pic, où il est d’abord installé dans une coupole en bois, puis réinstallé en 1947 dans une coupole métallique moderne de 5 mètres de diamètre.

Un télescope au service de l’observation photographique
Durant les années 1950, le T60 est principalement utilisé pour la photographie astronomique, à une époque où la plaque argentique est encore reine. Grâce à la stabilité du site et à la qualité optique de l’instrument, de nombreux clichés du ciel profond sont réalisés :
🔭 Galaxies lointaines,
🔭 Amas globulaires,
🔭 Nébuleuses planétaires …
Des travaux de mesure d’étoiles doubles, de suivi d’occultations stellaires et de surveillance de phénomènes lunaires y sont également menés.


Le passage au Newton : modernisation et déplacement
Dans les années 1960, le télescope est déplacé sur la terrasse sud du Pic, où il est modifié en configuration Newton pour faciliter l’observation visuelle et le travail photographique. Ce nouveau montage permet de placer l’oculaire sur le côté du tube, rendant l’instrument plus ergonomique pour l’usage quotidien.
Mais très vite, les grands instruments scientifiques installés sur le site, notamment le télescope de 1 mètre, puis celui de 2 mètres, accaparent l’essentiel des ressources et de l’attention des chercheurs. Le T60 est alors relégué à un usage plus occasionnel, parfois même laissé à l’abandon. Il faut attendre les années 1980 pour qu’il renaisse de ses cendres.
Une renaissance portée par les astronomes amateurs
En 1982, un petit groupe de passionnés, composé à la fois d’astronomes amateurs, de chercheurs, d’étudiants et de techniciens, se mobilise pour sauver et redonner vie au T60. Le projet : en faire un outil accessible à la communauté amateur tout en conservant une rigueur scientifique. Ce mouvement aboutit à la création, en 1985, de l’Association T60, chargée de la gestion, de l’entretien et du développement de l’instrument.
Cette renaissance est remarquable à plus d’un titre. C’est la première fois en France qu’un télescope de cette envergure, situé sur un site professionnel de haute altitude, est mis à la disposition des astronomes amateurs.

L’Association met en place un système de réservations de missions, forme les utilisateurs aux outils informatiques et optiques, et participe même à des projets de recherche collaboratifs avec des laboratoires. Le T60 devient un formidable outil pédagogique et scientifique, permettant à des passionnés chevronnés d’accéder à une astronomie de haute montagne.


Un témoin du passé
Bien qu’il ne soit plus en service aujourd’hui, le télescope T60 demeure un symbole fort de l’astronomie amateur au Pic du Midi. Toujours visible dans l’enceinte de l’observatoire, il est exposé au public comme témoin d’une époque riche en découvertes et en aventures scientifiques.
Pendant de nombreuses années, le T60 a permis à des passionnés de réaliser des observations de grande qualité grâce à son équipement moderne : caméras CCD, filtres photométriques, monture informatisée, capteurs de guidage, etc.

Il a ainsi contribué à l’étude du ciel profond, au suivi d’exoplanètes, à la surveillance d’étoiles variables, à la spectroscopie stellaire, ou encore à la formation à l’astrophotographie.


